L’origine de l’Institut Barthélemy-Joliette
(Extrait d’une conférence de presse donnée à l’occasion de l’inauguration des activités publiques de l’Institut Barthélemy-Joliette – Me Jean Fontaine, président – 25/11/1974)
Pour bien comprendre les raisons qui motivent la création de L’Institut Barthélemy-Joliette, il faut faire un retour sur les débuts de l’histoire de notre ville.
Le Village de l’industrie fut fondé en 1823, par l’honorable Barthélemy-Joliette. En 1841, le fondateur bâtissait une église; et en 1842, celle-ci recevait son premier pasteur.
Soucieux de l’éducation et de la formation chrétienne des jeunes de leur village, Barthélemy-Joliette et son épouse faisaient, le 4 février 1850, une donation dans le but d’avantager la population catholique de Joliette de biens que les donateurs jugeaient nécessaires à l’institution d’un petit séminaire pour les postulants à la vie religieuse, et d’un collège dont le but principal serait de former de bonne heure à la doctrine chrétienne et aux lettres les jeunes gens, et leur donner ainsi les habitudes d’une vie honnête, laborieuses et industrieuses, comme étant d’une grande utilité et d’un grand secours pour le bien de la religion comme pour celui de la société en général.
Pour concrétiser et institutionnaliser leur projet, ils en confiaient la réalisation aux Clercs Paroissiaux ou Catéchistes de Saint-Viateur. Et pour parer à toutes éventualités, les donateurs assortissaient l’acte de donation de diverses charges et conditions dont voici les principales :
A) l’usufruit des biens de la donation aux Clercs de Saint-Viateur; et charge d’entretenir les immeubles;
B) les fruits et revenus du collège seront employés exclusivement à défrayer les charges de la donation;
C) nue-propriété aux habitants catholiques romains de la paroisse St-Charles-Borromée;
D) usufruit et jouissance éventuellement réversibles à la Corporation épiscopale catholique romaine de Montréal, aux mêmes conditions.
Cette entreprise s’est poursuivie et développée depuis plus de cent ans. Un nombre considérable d’éducateurs se sont successivement consacrés à cette tâche éminente en répondant magnifiquement aux objectifs qui avaient présidé à la fondation de cette oeuvre essentielle.
Il faut rendre hommage à tous ces apôtres de l’éducation qui se sont dépensés sans compter. Ils ont bien mérité la reconnaissance de la population et, tout particulièrement, celle d’un nombre imposant de bénéficiaires.
La tâche n’a pas été facile pour les Clercs de Saint-Viateur de Joliette. Ils s’y sont consacrés avec autant d’énergie que de ténacité; et, c’est à une somme incalculable de dévouement qu’il faut établir leur mérite. Le Séminaire de Joliette, en effet, a toujours été une oeuvre privilégiée de leur communauté dans notre région. Et l’histoire doit reconnaître — comme je le fais ici avec plaisir et gratitude, — que nous leur devons une part considérable du patrimoine culturel, social et religieux de notre milieu.
Pour la réalisation de cette oeuvre, les Clercs de Saint-Viateur ont pu compter sur la collaboration de la population diocésaine, des évêques de Joliette, ainsi que de nombreux prêtres du clergé diocésain.
En 1947, c’était à 1,924 années d’enseignement qu’on totalisait la participation des prêtres séculiers au sein de cette institution… 650 d’entre eux y avaient collaboré : 40, pendant 10 ans; 21, plus de 15 ans; 8, plus de 20 ans; un, 28 ans; et un autre, plus de 30 ans. Dès lors, cette considération s’ajoute à d’autres pour expliquer qu’aujourd’hui, ce soit à l’Évêché de Joliette que la presse régionale retrouve des suites de l’histoire de la donation Joliette. Chez l’Évêque de Joliette, cette histoire n’est pas en territoire étranger.
Le système scolaire en vigueur au moment de la fondation du Collège de Joliette est demeuré pratiquement inchangé jusqu’en ces dernières années. C’est à des institutions privées, comme le Séminaire de Joliette, que la population du Québec faisait appel pour répondre aux besoins de l’enseignement secondaire. Et ce n‘est que récemment, pour satisfaire à des besoins nouveaux, que les pouvoirs publics ont pris les initiatives que l’on sait dans ce secteur de l’éducation.
À Joliette aussi, des écoles polyvalentes et un CEGEP ont été créés. Ils assument une large part de la tâche que Barthélemy-Joliette avait confiée au collège en 1850. Pourtant, ces écoles et ce nouveau collège n’épuisent pas les objectifs que s’était fixés le fondateur de Joliette et qui gardent leur actualité.
Ainsi, la préparation au sacerdoce n’a jamais été aussi exigeante que dans la conjoncture présente. Quant à la formation chrétienne des jeunes, voulue par les donateurs, elle suggère maintes initiatives complémentaires du système scolaire actuel. Elle appelle aussi une aide particulière aux éducateurs de la foi. En outre, « pour le bien de la religion comme pour celui de la société en général », il faut de toute nécessité que l’initiative privée soit en mesure d’assurer une certaine prise en charge des plus défavorisés dont le secteur public ne peut pas suffire à combler les besoins pressants.
Ces circonstances ont amené le CEGEP de Joliette à vouloir acquérir la plupart des biens du Séminaire de Joliette. Toutefois, cette dernière institution, dirigée par les Clercs Saint-Viateur, continue jusqu’à maintenant de dispenser l’éducation, au niveau secondaire, comme entreprise privée. Face à ces changements, l’Évêque de Joliette, conscient des responsabilités que lui confiait expressément la donation Joliette, a cru devoir faire en sorte que soit aussi assurée la poursuite des autres fins visées par les donateurs. Il a donc pris acte et fait des événements pour adopter les dispositions nécessaires, dans les circonstances, afin d’adapter à la situation présente l’oeuvre initiée en 1850.
C’est pourquoi, dans l’acte relatif à l’accord intervenu entre lui et les Clercs Saint-Viateur, à propos de la vente de certains biens du Séminaire de Joliette, l’Évêque de Joliette a prévu qu’une part du prix de vente serait affecté, de par son initiative, à la poursuite des objectifs visés par la donation Joliette et qui ne seraient pas autrement pris en charge. La détermination de cette somme d’argent s’y réclame d’une évaluation équitable eu égard à l’acte de donation Joliette, compte tenu de l’évolution du collège.
Du point de vue ecclésiastique, Rome a sanctionné cet accord. Et l’Assemblée nationale a aussi ratifié, sous forme de loi particulière, la transaction en cause, et elle a libéré les parties de la donation initiale.
C’est donc pour remplir une fonction éducative et sociale complémentaire que Monseigneur l’Évêque de Joliette a demandé et obtenu l’incorporation de L’INSTITUT BARTHÉLEMY-JOLIETTE, lequel a été doté, à son origine, de la somme de 831 250 $, conformément à l’accord précité, et à la date du 1er novembre 1971.
Cette somme a été remise sous forme d’obligations, datées du 1er mai 1974, portant intérêt au taux de 5 % l’an, et échéant en série le 1er mai de chacune des années 1975 et 2009 inclusivement.
Voici donc une initiative que Monseigneur l’Évêque de Joliette a voulu remettre à la population catholique de la région. Bien loin de se l’approprier, il en a fait, dans l’esprit de la donation Joliette, un bien de cette population.